Instauré par la « Loi travail » en 2016, le droit à la déconnexion a pour but de nous protéger des outils de connexion professionnels hors des heures de travail. Depuis le début de la pandémie, avec la généralisation du télétravail, le sujet est plus que jamais d’actualité. Alors avez-vous déjà entendu parler de ce droit ? 
Pour parler déconnexion aujourd’hui, nous avons interviewé Boris NEPVEU, coach et consultant en déconnexion, également fondateur de l’association « Sans Mon Portable » .

L’interview de Boris Nepveu par Cécile Tauvel

Boris, tu as créé une association nommée « Sans Mon Portable » www.sansmonportable.com, que signifie selon toi la déconnexion ?

Pour moi, la déconnexion signifie beaucoup. Se déconnecter c’est surtout, se reconnecter à l’essentiel, aux autres, sa famille, ses proches, ceux qu’on aime, ceux qui demandent juste de l’attention. Et dans le monde professionnel, c’est l’opportunité, de manière organisée, de se reconnecter à ses collaborateurs, ses collègues et ses clients.

Qu’apporte la déconnexion ou “digital detox” ?

Tout d’abord, soyons clairs. Je ne rejette évidemment pas l’usage même des outils numériques, qui ont envahi notre vie quotidienne, que ce soit dans la sphère privée, comme dans la sphère professionnelle. J’ai un portable, je reste joignable, mais je choisis mes moments de déconnexion. Et ces moments-là, je les consacre à l’échange avec mon entourage, l’attention offerte aux autres, la lecture, l’activité sportive, etc…

Ce qu’apporte la déconnexion c’est donc une belle opportunité, celle d’avoir le choix, le choix du moment, de la qualité, dans ses interactions avec les autres. Et c’est d’abord l’opportunité de prendre soin de soi, immodérément. 

Digital detox

Qu’est-ce qui t’a motivé à créer cette association ? Quels sont ses objectifs ? 

Mes motivations viennent de l’observation du monde autour de moi, de nous, des comportements du quotidien, à la maison, comme dans la sphère professionnelle. Qui n’a jamais vu, au restaurant, des familles entières rivées sur leurs smartphones, et qui ne se parlent pas, ou plus ? Qui n’a jamais reçu un mail (ou plusieurs) de son voisin de bureau, ce même voisin qu’on croise pourtant à la machine à café ? Qui n’a jamais vu un conducteur consulter ses SMS ou mails en conduisant ? Qui n’a jamais vu une bande d’amis, ensemble, et pourtant chacun sur son smartphone ? Qui n’a pas, soyons honnêtes, pris l’habitude de laisser son smartphone sur la table de chevet, à proximité de soi, pendant son sommeil ? 

L’objectif de l’association Sans Mon Portable est double:

  • Attirer l’attention de tous sur les enjeux et risques liés à l’hyper-connexion;
  • Proposer des actions de formations et des événements permettant de mettre en œuvre une déconnexion (ou Digital Detox) adaptée.
déconnexion

– Du 8 janvier au 7 février 2021, ton association a proposé 30 défis, 30 gestes, 30 réflexes, 30 belles habitudes pour reprendre le contrôle sur votre « doudou numérique », peux-tu nous en dire plus ?

Prendre conscience et agir pour sa déconnexion, c’est ancrer du bien-être dans les gestes de tous les jours. Il n’y pas de place à la théorie pour progresser, c’est ma conviction, seulement des gestes, pour avancer, se sentir mieux. C’est pourquoi j’ai imaginé, pour 30 jours, 30 défis qui se terminent à l’occasion des Journées Mondiales sans Portable, initiative lancée en 2001 par Phil Marso, que je salue.

Quelles sont les principales erreurs des entreprises ou institutions sur le sujet de la déconnexion selon toi ?

Je ne sais pas si on peut parler d’erreur. Ou s’il y en avait une, ce serait certainement de considérer les méfaits de l’hyper-connexion comme un sujet à prendre en compte, quand on a traité…le reste. Ou de considérer que, parce qu’on a mis un baby-foot dans la salle de pause, on a fait un super cadeau à ses salariés.

  • Toute entreprise a besoin de veiller à la motivation de ses équipes.
  • Toute entreprise a besoin de gérer un bien précieux : son temps.
  • Toute entreprise est en recherche d’efficacité permanente auprès de ses clients.

Et pourtant…

Saviez-vous que, selon une étude menée en 2018 par Opinionway pour Eléas, 16% des entreprises seulement avaient mis en œuvre des actions concrètes pour le Droit à la Déconnexion en leur sein ?

Saviez-vous que la disparition progressive de la frontière entre vie pro et vie perso (phénomène appelé “blurring”), est un risque majeur pour le bien-être des salariés, a fortiori dans un contexte de télétravail ?

Saviez-vous que, selon l’ORSE (Observatoire sur la Responsabilité Sociétale des Entreprises), après avoir reçu et lu un mail, il vous faut 64 secondes pour vous re-concentrer ?

Enfin saviez-vous que l’humanité a produit plus d’informations en 30 ans qu’en 2.000 ans d’histoire (phénomène appelé “infobésité”) ? 

Quelles sont les meilleures pratiques que l’on peut apporter en entreprise ?

Faire appel à moi ! 😉

Concrètement, il y a plusieurs manières d’aborder le sujet en entreprise. La meilleure est de mobiliser l’équipe dirigeante. En effet, c’est “à la tête” que cela se joue, et que l’impulsion réside, pour déclencher un “mieux-être numérique” en entreprise.  

La quantité de mails que les collaborateurs s’échangent, jusqu’à quelle heure, pour dire quoi, avec combien de “répondre à tous”…tout est question de prise de conscience, décision, et de mise en oeuvre. 

De manière encore plus pratique, organiser des réunions où les participants viennent, en laissant leur smartphone à l’entrée de la salle, gardent leur ordinateur portable fermé, prennent de quoi écrire, un bon vieux cahier/ crayon, c’est un bon début. Et d’ailleurs, à combien de réunions avons-nous déjà assisté, qui n’ont débouché sur rien d’autre que…une autre réunion ?

Un large catalogue de formations et d’ateliers est disponible.

Et à titre individuel, comment peut-on agir ? 

Là aussi. La meilleure manière d’agir c’est déjà de se demander… si on le veut vraiment. Et quand on dit “à titre individuel”, de quoi s’agit-il ? Pour soi-même, sa famille, son entourage, ses collègues en entreprise ?

A titre individuel et personnel, celui (ou celle) qui le veut, peut mettre en œuvre un certain nombre de règles ou bonnes pratiques au quotidien. L’objectif serait d’imaginer un usage plus raisonné de ses outils numériques.

Parmi ces bonnes pratiques :

  • Laisser son smartphone en dehors de la chambre;
  • Prendre ses repas, y compris le petit-déjeuner, sans son smartphone;
  • Désactiver le plus de notifications possibles (sonores et visuelles);
  • Mettre son smartphone en mode avion quand on souhaite se concentrer sur une tâche précise;
  • Passer son écran en noir & blanc;
  • Décider de moments consacrés à ses réseaux sociaux (et uniquement ceux-là par conséquent…);
  • Pratiquer le sport, la méditation, la marche… sans smartphone !

Je propose également, pour les plus accros, un coaching individualisé, qui produit des effets fantastiques…

et enfin 

A noter : Éteindre son téléphone cinq minutes toutes les nuits !

Le saviez-vous ? Ce conseil à adopter d’urgence pour une bonne raison : le gouvernement australien et la NSA aux États-Unis renouvellent le conseil selon lequel il faudrait éteindre son smartphone au moins 5 minutes par jour, au nom de la cybersécurité. Lire l’article du midi Libre

Les questions “inspiration”

Qu’est-ce qui te plaît dans tes missions au quotidien ?

Prendre le temps d’écouter les dirigeants, les managers, les collaborateurs, et imaginer avec eux les meilleures manières d’être efficace et serein… au travail.

Comment équilibres-tu ta vie personnelle et professionnelle ?

Je m’impose plusieurs rituels. Comme celui de laisser mon portable dans la boîte à gants, quand je dîne avec ma femme au restaurant. Quand je suis en famille, je veux l’être VRAIMENT. Comme quand je suis avec mes clients d’ailleurs, je ne passe pas mon temps en conversation téléphonique avec ma femme. Question de logique ! 😉

Qu’est-ce qui te fait gagner du temps ?

Les “to-do list” réalistes et réalisables. Faire une chose à la fois, mais la faire bien. D’où le fait de s’autoriser à couper le maximum de notifications, qui sont autant d’occasions d’être interrompu !

Qu’est-ce qui te fait gagner de l’énergie ?

Remercier un client pour sa confiance, fêter un anniversaire, organiser une rencontre. J’ai besoin de cela pour gagner en énergie.

 Qu’est-ce qui t’inspire ? (une personne, un livre, une œuvre d’art…)

Sans hésiter : 
Un livre : Les quatre accords toltèques de Miguel Ruiz.
Une œuvre d’art : l’Homme.

Cette interview vous est proposée par Cécile Tauvel, co-fondatrice de La conciergerie d’entreprise La Minut’Rit. Merci à Boris NEPVEU, fondateur de l’association « Sans Mon Portable » pour ce bel échange !

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